Lire  : Tout sauf simple !

 Processus de lecture . Adapté de Grainger et Holcomb par C. Argensse pour MilleMots.org
Processus de lecture . Adapté de Grainger et Holcomb par C. Argensse pour MilleMots.org

On ne dira jamais assez, combien lire est une tâche complexe.

 

Cela semble si naturel à beaucoup d'entre nous, qu'on ne pense jamais que l'écriture est une invention récente, que toutes les langues n'ont pas développé de forme écrite et que tous les hommes ne savent pas lire, loin s'en faut.

Comme le processus est infiniment complexe, il suffit de peu de chose pour le perturber.

Le schéma ci-dessus représente  les étapes du processus de lecture.

 

Apprendre à lire, c'est automatiser les différentes étapes.

 

Avant d'apprendre à lire, on connait les mots sous la forme orale, c'est la voie phonologique en vert sur le schéma. Petite différence cependant, de multiples études montrent que sans savoir lire, à la question : Quels sons entendez-vous dans "gâteau" ? La réponse est : "ga" et "to".

 

Donc, la première étape va être de permettre au cerveau de découper la syllabe en unités de sons /g/ /a/ /t/ /o/, on parle de conscience phonologique. Ce n'est pas si simple.

Dans l'article de la semaine dernière, je vous parlais de cette découverte de chercheurs de L'Illinois : les personnes ayant des troubles de l'apprentissage de la lecture ont du mal à encoder (transformer en signal exploitable par le cerveau) la consonne d'une syllabe dans un milieu bruyant. Déjà une difficulté, et l'apprentissage n'est même pas commencé !

 

Reconnaitre les lettres : Pas si simple !

 

Il faut une bonne orientation dans l'espace, percevoir chaque lettre comme un élément et un seul,   ... là encore, de multiples écueils sont à surmonter. 

(voie bleue 1 & 2) .

 

  Associer le signe au son.

 

(zone de conversion). En isolation, c'est relativement simple, surtout pour les langues dites transparentes comme l'espagnol, mais quand les signes sont dans un mot, il faut les regrouper en syllabes, conserver l'ordre, le sens de lecture ...

 

Associer le mot au sens.

 

Après toutes ces opérations, il faut que le mot, ainsi décodé "active" le sens stocké dans notre mémoire lexicale. Cela ne marche, que si ce mot fait déjà partie du vocabulaire de l'apprenti lecteur.

 

Un apprenti lecteur, va commencer par la voie bleue, et immédiatement passer à la voie verte, au niveau de la lettre, de la syllabe, du mot ... tous ces va-et-viens entre les deux formes du mot, écrite et orale, sont très coûteux en mémoire de travail (MdT). La Mdt n'est pas extensible, le mot oral qui va être comparé au lexique ne sera pas forcément complet, identique ...

 

Un lecteur expert  ne va plus du tout passer par la voie phonologique (verte), il ne va même plus lire toutes les lettres.

 

Si tout se passe bien, vers l'adolescence, l'automatisation est en place.

Le cerveau passe "directement" du signe au sens.

 

On pense que le cerveau du lecteur effectue une sorte de calcul de probabilité, qui élimine tous les mots incompatibles avec les signes lus.

Il ne passera par la voie phonologique (verte) que si sa lecture est perturbée, par des mots mal écrits ou dont il ignore le sens.

 

Cela vous semble déjà compliqué ? Ce n'est qu'une petite partie du processus. Je n'ai pas évoqué comment fonctionnent les zones de conversion ...

 

Lire est un processus complexe, son apprentissage demande infiniment de soin, de temps, une vigilance de chaque instant de la part de l'enseignant, pour repérer les enfants qui ont des difficultés. Dans l'idéal, dès qu'un enfant a des difficultés pour apprendre à lire, tout devrait être mis en œuvre, pour l'aider. Dans mon expérience : "ça va s'arranger tout seul !"  est une affirmation rarement vérifiée.

 

J'espère que vous mesurez mieux maintenant, l'incroyable prouesse que réalise un enfant en apprenant à lire, et plus encore, si un de ces processus est perturbé par un trouble dys.

 

C.A.



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